La consignation des sommes saisies à titre conservatoire, entre les mains d’un séquestre désigné dans l’ordonnance d’autorisation du JEX de pratiquer cette saisie, n’est qu’une modalité de la mesure conservatoire et doit en suivre le sort.
Selon l’article L. 622-21 du code de commerce, le jugement d’ouverture d’une procédure collective arrête ou interdit toute procédure d’exécution de la part des créanciers dont la créance n’est pas postérieure, régulière et utile à la procédure, sous réserve des mesures qui ont déjà produit un effet attributif. Ce principe de l’arrêt des poursuites individuelles compromet également toute possibilité de conversion ultérieure d’une saisie conservatoire, laquelle se voit ainsi privée rétroactivement de tout effet. La question qui s’est posée est de savoir si le versement des sommes saisies entre les mains d’un séquestre, prévu par le juge dans l’ordonnance d’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire de créances, constitue une mesure autonome, qui subsisterait indépendamment de la saisie. La chambre commerciale de la Cour de cassation retient que l’autorisation de consigner entre les mains d’un séquestre les sommes saisies constitue une simple modalité de la mesure conservatoire qui la justifie et que, faute d’avoir été convertie en saisie-attribution avant l’ouverture de la procédure collective, la saisie conservatoire est caduque.
En l’espèce, dans le cadre d’une procédure de fixation d’un loyer commercial, un rapport d’expertise judiciaire revoit à la baisse le prix du bail, faisant naître une créance au profit de la société locataire. Pour en garantir le recouvrement, cette dernière obtient du juge de l’exécution (JEX) l’autorisation de pratiquer, entre ses propres mains, une saisie conservatoire de créances et, pour ce faire, de verser les sommes saisies sur le compte Carpa de son avocat, institué séquestre. Par la suite, la société bailleresse est mise en liquidation judiciaire. Le mandataire judiciaire conteste la mesure devant le JEX demandant, sur le fondement de l’article L. 622-21 précité, la mainlevée de la mesure et, par voie de conséquence, le versement entre ses mains des sommes séquestrées ainsi que des loyers à échoir. Le juge, qui rejette par ailleurs l’exception d’incompétence soulevée en défense par la société locataire, fait droit à la demande du mandataire.
La cour d’appel infirme le jugement entrepris du chef de la compétence et déclare le tribunal de la procédure collective seul compétent pour connaître de la demande de mainlevée ; mais, statuant sur le fond en application de l’article 90, alinéa 2 du code de procédure civile, elle le confirme pour le surplus.
La société locataire forme un pourvoi en cassation. Elle soutient que l’autorisation donnée par le JEX de verser les loyers entres les mains d’un séquestre est une mesure autonome de la saisie conservatoire qui ne peut souffrir de l’arrêt des poursuites individuelles.
La Cour de cassation rejette le pourvoi. Le séquestre prévu dans l’ordonnance d’autorisation de pratiquer une saisie conservatoire de créances ne revêt aucun caractère autonome, mais constitue une simple modalité de la mesure. Par conséquent, la caducité de la saisie conservatoire entraîne inévitablement la libération des sommes consignées.
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Ulrik Schreiber, diplômé Commissaire de justice, juriste consultant, Chambre nationale des commissaires de justice